Cette semaine, dans les salles de cinéma (plus exactement dans les salles où le mot cinéma ne rime pas uniquement avec blockbuster pour ados s’empiffrant de pop-corn) sort un film dont on ne parle pas et dont l’affiche ne risque pas de jaunir au soleil. Pourtant c’est un pur chef-d’œuvre que je vous recommande chaudement.
J’ai eu l’occasion, tout à fait fortuite, de le voir lors d’une diffusion à la télé il y a quelques mois. C’était à l’heure où les programmes peuvent vous endormir en trois minutes ou vous laisser subjugué, capté par des images faisant taire en vous la voix intérieure qui murmure que le réveil matin vous punira le lendemain. Vous aurez compris qu’en l’occurrence on était dans la deuxième solution. Vous vous doutez également que ce n’est pas un film destiné à ratisser un large public et faire baver les marchands de lessive.
Ca s’appelle « Paul dans sa vie » (merveilleux titre !) et c’est un documentaire de Rémi Mauger sur un personnage attachant, paysan à l’aube de la retraite dans les paysages flous et brumeux du cap de la Hague. Paul y est né. Il y mourra. Et il y vit.
C’est cette existence que d’aucuns pourraient qualifier de médiocre que ce beau film nous donne à contempler. A travers le portrait d’un modeste ouvrier de la terre s’exprime la vie de tous ceux qu’on croise et qu’on ne veut pas voir, la voix des inaudibles, parce que les forts en gueule monopolisent le débat, qu’on se met soudain à écouter, la sagesse et le bon sens hérités de la nature, du travail et de la transmission du savoir.
Paul est un être unique, de ceux que l’on côtoie parfois, de plus en plus rarement, dans les familles, au travail, sur la place du village, dans telle rue de la ville. Ceux que l’on regarde avec un petit sourire et dont il arrive qu’on se moque. Parce qu’ils semblent hors du temps. Ceux que l’on croit volontiers nigauds parce qu’ils ne prennent jamais la parole. Ceux que l’on domine parce qu’ils baissent souvent les yeux.
Nous sommes loin des paillettes et des débauches de misérables vanités de notre société télé robotisée, avec tant de fausses idoles et de mauvais exemples. Ce film est une thérapie. Même si c’est pour un temps trop court, on en ressort différent et il laisse des traces.
Comme les pas de Paul sur le chemin de sa vie, de notre vie.
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