Septembre 2008,
Depuis quelques jours, moi qui ne demandais rien, je vis dans la mémoire d’un jeune enfant de CM2. Avant j’étais oublié, un peu trop peut-être vu ce que la folie des hommes m’avait fait subir. Je commençais même à être peu à peu ignoré, mais au moins, j’étais tranquille !
Depuis que mon nouveau tombeau est la tête d’un garçon du XXI ème siècle, mon univers ressemble à un cauchemar. Ici c’est le désert complet. Dans cette mémoire, à part moi, y’a pas grand chose.
A travers les yeux du garçon, ce que je vois me fait frémir. D’abord lui, le matin, dans le miroir de la salle de bain, plein de bourrelets partout, grassouillet de la tête au pied. Pas étonnant quand on additionne ce qu’il engloutit du matin au soir.
Tout en mangeant, il passe son temps devant un truc qu’il appelle la télé et qui fait beaucoup de dégâts dans sa tête. Je peux l’attester, je suis le témoin impuissant de tous ces ravages. Et quand il se lasse, il monte dans sa chambre et s’installe devant un autre engin, son ordinateur, pour se distraire avec des jeux de guerre où il tire sur tout ce qui bouge. Moi, ça me donne envie de pleurer.
Aucun livre ne passe dans ses mains. Il feuillette furieusement des magazines qui racontent des histoires idiotes sur de drôles de gens.
A l’école, il n’écoute rien la plupart du temps et pendant que la maîtresse hurle, il somnole, grignote du chocolat ou rigole carrément avec ses copains. Quand il parle c’est souvent avec des gros mots, des phrases mal construites et peu de vocabulaire.
Il ne chante jamais et quand il rit c’est pour faire comme tous les autres mais, caché où je suis, je vois bien qu’il s’ennuie. Sa vie est comme sa tête, totalement vide.
Sans projet, sinon l’émission télé du soir.
Sans envie, sinon la bouteille de coca dans le frigo.
Sans espoir, sinon de ne pas être interrogé pour la leçon qu’il n’a pas apprise.
Sans rêve, sinon de devenir footballeur professionnel, lui qui s’essouffle en grimpant l’escalier de sa chambre.
Je suis dans sa mémoire mais il m’a déjà oublié, sans avoir eu la curiosité de savoir pourquoi moi je suis mort quand j’avais le même âge que lui. La maîtresse a bien essayé d’expliquer à la classe ce qui s’est passé dans ces horribles années-là mais peu l’ont vraiment écoutée. Le garçon a récupéré mon nom, l’a lu difficilement et je me suis retrouvé dans sa mémoire.
Dans quelle tête est partie ma sœur ? Et mes copains avec qui je riais tant ?
Je ne vois vraiment pas à quoi tout cela peut servir.
A moi, ça n’apporte rien. Au garçon qui m’héberge, pas mieux.
Même si ça me désole, au moins, je revis un peu.
Lui, il continue à ne pas s’en faire, mais il est déjà mort.
J'ai mis du temps a comprendre ou tu voulais en venir et puis ca c'est éclairé ! Jolie facon d'expliquer ton opinion sur le sujet que je partage totalement.
bon t'as un peu forcé le trait mais je suppose que c'est pour la clarté de la démonstration ;o)
Rédigé par : Jipes | 20 février 2008 à 10:34
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http://desordonnee.blogspirit.com/archive/2008/02/20/devoirs-du-soir.html
Rédigé par : Jipes | 20 février 2008 à 16:18
La porte était ouverte par Jipes, merci à vous deux.
Rédigé par : augenblick | 20 février 2008 à 17:00
Bien vu !
Rédigé par : Sophie Ménart | 21 février 2008 à 18:25
Tiens , j'ai l'impression d'avoir vu ce gamin quelque part, je le rencontre même à l'heure des repas :-)
Bon texte, Mich, j'aime cette façon d'amener les idées, juste en les déposant sans forcer : prend qui veut.
Et pour ma conclusion : sauve qui peut !
Rédigé par : Guelum | 21 février 2008 à 21:54
Deja que les cartables des enfants de CM2 sont trop lourds et leur provoquent des scolioses, qu'est ce que cela va être si on y rajoute en plus un enfant mort !
Rédigé par : Paul | 23 février 2008 à 16:12